Imaginez-vous vous réveiller après une simple intervention chirurgicale… avec un accent complètement différent. C’est ce qui est arrivé à Laetitia, une femme de la Sarthe. Opérée des amygdales en 2014, elle a développé un phénomène rare : le syndrome de l’accent étranger. Une modification inexpliquée de sa voix, qui persiste aujourd’hui encore. Explications sur cette anomalie cérébrale fascinante, avec l’éclairage de la psychologue Claire Petin.
Un cas rarissime : parler anglais après une opération des amygdales
En apparence anodine, l’intervention chirurgicale de Laetitia a eu une conséquence inattendue : au réveil, elle parlait avec un accent anglais . Ce changement vocal soudain n’a pas été pris pour une complication grave sur le moment, mais il ne s’est jamais résorbé.
Après plusieurs consultations chez des spécialistes — ORL, orthophonistes, neurologues — aucun traitement n’a permis de restaurer son accent initial. Comme le lui a dit un médecin :
- « Vous êtes un mystère pour la science. »
Aujourd’hui âgée de 47 ans, elle vit avec cet accent étranger comme une partie intégrante d’elle-même, même si intérieurement, elle continue d’entendre « sa propre voix ».
Qu’est-ce que le syndrome de l’accent étranger ?
Ce trouble neurologique très peu fréquent se manifeste par un changement soudain dans la prononciation et l’intonation d’une personne, donnant l’impression qu’elle parle avec un accent étranger — souvent perçu comme anglais, allemand ou asiatique, selon les cas.
Il peut survenir :
- À la suite d’un AVC.
- Après un traumatisme crânien.
- Ou, plus rarement, après une anesthésie générale.
Le mécanisme exact reste mal compris, mais il implique généralement une lésion légère dans les zones du cerveau contrôlant la prosodie et l’articulation .
À noter :
- Moins de 100 cas documentés dans le monde.
- Les symptômes peuvent être temporaires ou permanents.
- La perception de l’accent varie selon les auditeurs.
L’impact psychologique sous-estimé
Si le phénomène intrigue les scientifiques, il bouleverse aussi profondément la vie quotidienne de ceux qui en sont touchés. Selon la psychologue Claire Petin , ce changement vocal peut entraîner :
- Une incompréhension de l’entourage – proches et collègues pensent parfois à une blague ou à un trouble psychiatrique.
- Un décalage entre soi et sa voix – la personne entend sa façon de parler comme étrangère, ce qui provoque une dissonance identitaire.
- De l’anxiété ou de la solitude – le rejet social ou les moqueries peuvent pousser à l’isolement.
Comme le souligne Claire Petin :
« Autant de facteurs qui peuvent générer anxiété, isolement et parfois dépression. »
Comment prendre en charge ce syndrome ?
Même si le syndrome de l’accent étranger est difficile à guérir, plusieurs pistes thérapeutiques existent :
- Suivi neurologique : identifier si une lésion cérébrale est à l’origine du trouble.
- Orthophonie : travailler la prosodie, la prononciation et retrouver un schéma vocal familier.
- Accompagnement psychologique : renforcer l’estime de soi et aider à gérer le regard des autres.
- Traitement médicamenteux : en cas de troubles associés comme l’anxiété ou la dépression.
Chaque situation est unique. Il faut donc adapter la prise en charge aux besoins spécifiques de la personne concernée.
Conclusion : quand le cerveau change la voix sans qu’on y puisse rien
Le cas de Laetitia rappelle à quel point le cerveau reste une zone mystérieuse. Un simple geste chirurgical peut avoir des répercussions inattendues, modifiant non seulement la voix, mais aussi l’identité perçue de la personne.
Derrière l’aspect spectaculaire de ce syndrome se cache une réalité complexe : celle d’un impact psychologique important, souvent ignoré. Heureusement, avec un accompagnement pluridisciplinaire, il est possible de mieux vivre avec ce changement inattendu.