Derrière chaque plateau bien garni, chaque verre rempli à la perfection, il y a un serveur. Et parfois, un sourire forcé. Dans un secteur déjà éprouvé par les crises successives — pandémie, inflation, baisse de fréquentation —, les professionnels de la restauration craquent. Sur des forums comme Quora, mais aussi en coulisses des restaurants, ils dévoilent, sans filtre, les comportements de leurs clients qui dépassent les limites. Entre indécision chronique, claquement de doigts et téléphones collés aux mains, voici ce que le personnel en hôtellerie et restauration ne supporte plus. Et pourquoi certains gestes, anodins pour vous, sont perçus comme des offenses.
L’indécision : le cauchemar des cuisines
Le plat principal est servi. Le silence s’installe. Puis, une voix s’élève : « On va prendre une autre entrée finalement. »
Ce scénario, banal pour certains, est un véritable casse-tête pour les serveurs. Comme le confie Kane Mantyla, ancien employé de restaurant, « la chose la plus frustrante, c’est quand les clients passent des commandes supplémentaires juste après que j’ai déposé les plats ».
Chaque modification perturbe la logistique en cuisine, retarde les autres tables, et met une pression inutile sur toute l’équipe. Ordonner tout en une fois — boissons, plats, desserts — n’est pas une exigence. C’est simplement du bon sens.
Le claquement de doigts : un geste impardonnable
« Le client est roi », oui. Mais un roi qui claque des doigts ? Non.
Plusieurs serveurs ont souligné ce comportement comme l’un des plus humiliants. « Le claquement de doigts, c’est tellement impoli », affirme un employé sur Quora. Ce geste, souvent vu comme une marque de supériorité, réduit le personnel à un objet d’appel, comme un chien.
Pourtant, il existe des alternatives simples : un regard, un léger signe de la main, un sourire. Même en période d’affluence, la politesse reste la meilleure des efficacités.
Les enfants en liberté : quand le restaurant devient terrain de jeu
Les enfants sont les bienvenus. Mais pas à n’importe quel prix.
Plusieurs témoignages font état d’un phénomène récurrent : les enfants qui courent entre les tables, renversent des verres, grimpent sur les chaises. « Je n’ai pas signé pour faire du baby-sitting », lâche un serveur. Un autre ajoute : « Combien de fois j’ai failli trébucher à cause d’un gamin qui sprinte entre les allées ? »
Les parents ont le droit d’emmener leurs enfants au restaurant. Mais ils ont aussi celui — et surtout le devoir — de les surveiller. Un restaurant n’est pas un parc d’attractions.
Le smartphone sur la table : un espace perdu, une attention volée
Les téléphones envahissent les tables. Et avec eux, les problèmes.
Kate, serveuse dans un restaurant parisien, raconte : « Quand j’arrive avec les plats et que personne ne bouge son téléphone, je ne sais plus où poser les assiettes. »
Pire encore : certains clients restent scotchés à leur écran même quand le serveur vient prendre la commande. « Je suis là, en face de vous, et vous ne levez pas les yeux », regrette un employé. Ce manque d’attention, perçu comme un mépris, mine la relation humaine au cœur même du service.
Les pourboires oubliés : quand la gratitude disparaît
En France, le pourboire n’est pas obligatoire. Mais il reste un geste de reconnaissance. Et quand il est absent, surtout après des demandes répétées ou un service personnalisé, cela blesse.
Kevin, serveur dans le Sud, s’interroge : « Des gens exigent beaucoup, changent trois fois de plat, demandent des modifications, et repartent sans laisser un centime. Ils ne savent pas comment ça marche ? Ou ils sont juste radins ? »
Le pourboire n’est pas une obligation, mais il est souvent vécu comme une reconnaissance du travail accompli. Son absence, dans certains cas, sonne comme un rejet.
Les places convoitées : la guerre des tables
« Je veux la table près de la fenêtre. » « Celle au fond, c’est la nôtre. »
Les serveurs entendent souvent ce type de demande. Et souvent, ils doivent dire non. Tala, employée dans un café lyonnais, explique : « Tellement de gens pensent qu’ils méritent la meilleure table, sans penser aux autres. »
Or, les restaurants ont un nombre limité de places. L’impatience, les réclamations, les regards noirs quand on n’obtient pas ce qu’on veut : tout cela ajoute une pression inutile sur un personnel déjà sous tension.
Et si on reprenait les bases du bon sens ?
Le métier de serveur est exigeant. Physiquement, émotionnellement, socialement. Il demande de la patience, de l’empathie, de la rapidité. Et pourtant, il est souvent sous-estimé.
Les professionnels ne demandent pas la perfection. Juste un peu de respect. Une commande claire. Un regard quand on parle. Un merci. Un pourboire modeste. Un enfant surveillé. Un téléphone mis de côté.
Comme le rappelle un employé sur Ouest-France : « On ne vous sert pas parce qu’on est inférieur. On le fait parce qu’on aime notre métier. Mais on a aussi droit à de la dignité. »